Salut Reader et bienvenue dans cette 19ème édition du Weekly Focus !
J'espère que ce mail te trouve en forme en ce début d'année 2024.
Aujourd'hui, je vais te parler d'une compétence cruciale pour avancer vers tes objectifs. Compétence qui est aussi la plus difficile à développer quand on a un TDAH.
On va aborder plein de sujets passionnants : Jung, neurosciences et structures cérébrales, dopamine et productivité.
Et à la fin, je te partagerai 2 pistes concrètes pour avancer et faire de 2024 ta meilleure année.
Sans plus attendre, c'est parti !
Sommaire :
1) Qu’est-ce que le deep work ?
2) Deep work, cerveau et TDAH
3) Mes conseils pratiques
4) Conclusion
Dans les années 1920, le psychologue Carl J. Jung se retire régulièrement dans sa demeure située à Bollingen, aux abords de la rive nord du lac de Zurich, en Suisse.
À cette époque, sa carrière bat son plein : il vient de publier son premier ouvrage majeur, et il est au coeur de dissensions sur sa conception de l'inconscient avec Freud.
Contrairement aux apparences, sa maison en bord de lac n'a pas pour but de lui offrir des vacances afin d'échapper à sa vie zurichoise mouvementée.
En reconstituant ses témoignages et diverses sources, on sait qu'il profitait de ces moments reculés pour lire, réfléchir, écrire et faire avancer sa pensée.
Malgré ses nombreuses occupations et ses patients à suivre en ville, il lui est essentiel de prendre ce temps et ce recul pour avancer sur sa mission : élaborer sa propre théorie psychologique pour mieux comprendre l'humain et aider les individus en souffrance.
Ses journées étaient routinières :
La postérité a donné raison à Jung concernant ce choix de productivité : ses théories ont révolutionné la compréhension de la psyché humaine et inspiré plusieurs générations de psychologues dans sa lignée, encore jusqu'à aujourd'hui.
On peut le dire : même si son génie y est pour beaucoup, c'est sa capacité à abattre du travail de fond qui a fait la différence.
Plutôt que de se laisser happer par les opportunités et les sollicitations externes, il a intentionnellement dédié une partie de son temps et de son énergie à son projet de vie, certes peu urgent, mais profondément important.
Ce "travail en profondeur" a aujourd'hui un nom : l'écrivain américain Cal Newport l'appelle "Deep work".
Selon Newport, le deep work est LA compétence cruciale du XXIè siècle. À l'ère des smartphones, des réseaux sociaux et de l'ultraconnectivité, la capacité à se plonger dans son travail sans distraction, pour extraire le nectar de nos capacités intellectuelles, va faire la différence.
C'est ce qui distingue l'individu moyen de celui qui excelle et impacte le monde par ses actions.
Personnellement, je n'ai pas grand chose à redire à cette idée. Quand on est créatif et curieux, on passe beaucoup de temps à réfléchir et consommer des contenus. Mais ce qui importe vraiment (et qui pêche souvent), c'est la capacité à produire.
Pendant longtemps, ce fut mon cas : je foisonnais d'idées, mais j'étais incapable de passer à l'action. Impossible pour moi de prendre ce temps pour deep work, malgré toute la volonté du monde.
Sauf qu'à cette époque, j'ignorais qu'un TDAH se cachait derrière mes difficultés.
Même si la nécessité de deep work fait sens, on peut vite se sentir coupable de ne pas y arriver.
Le TDAH met des bâtons dans les roues de deux manières différentes.
Sur le spectre de l'attention, le TDAH fait osciller entre 2 extrêmes : hyperfocus et hypercogitation.
L'hyperfocus est un excès d'absorption qui nous plonge totalement dans une tâche donnée. Le problème, c'est que la tâche en question est rarement celle qu'on a prévue en amont et qui nous aiderait vraiment à avancer sur nos projets.
On se trouve alors à faire du deep work, mais aléatoire. Notre énergie est focalisée sur une action dont l'impact et les résultats sont minimes. Par exemple : refaire son site web (au lieu de trouver des clients), répondre à des mails (au lieu d'avancer sur un rapport), scroller son téléphone, jouer des heures à un jeu vidéo...
L'hypercogitation est un excès de distraction où nos pensées parasites prennent le dessus. On n'arrive pas à focaliser son attention sur une tâche.
Résultat : on se disperse, on n'avance pas, on n'est pas efficace.
Cette hypercogitation est souvent ce qui va empêcher le passage à l'action et nuire à notre motivation. Les pensées parasites par rapport à la tâche peuvent nous rendre anxieux vis-à-vis d'elle. Le cerveau va donc l'éviter.
C'est la recette de la procrastination.
Le problème : le cerveau est bête et méchant. Il considère que tout ce qu'on évite est effectivement un danger. On alimente donc un cercle vicieux qui rend la tâche en question de moins en moins susceptible d'être faite, et de plus en plus menaçante. Jusqu'à la dernière minute - ou pas.
Les études neuroscientifiques sur le sujet mettent en avant une problématique centrale chez les TDAH : des taux de dopamine trop bas.
Ces taux de dopamine bas ouvrent la porte aux deux travers qu'on vient de décrire :
Au niveau cérébral, les chercheurs ont mis en avant deux réseaux de neurones, présents chez tout le monde, et directement sous contrôle dopaminergique :
Le DMN est le réseau qui s'active quand on ne fait rien, quand on se détend, qu'on se promène. Autrement dit, on n'est engagé dans aucune tâche. Ce réseau est intimement lié à la créativité et à l'introspection.
Le TRN, quant à lui, est un réseau de neurones orienté vers un objectif, vers la réalisation d'une action.
Chacun de ces réseaux implique des zones cérébrales différentes. Toutefois, ces réseaux communiquent entre eux.
Le DMN implique des neurones situés dans plusieurs zones :
Chez un individu normal, ces 3 zones fonctionnent de manière synchronisée. Quand une zone est active, les autres le sont aussi, comme un groupe de musique qui joue ensemble en harmonie.
Le problème qu'on observe chez les personnes TDAH, c'est que le DMN n'est plus synchronisé. Les instruments ne jouent plus en harmonie.
Le TRN, quant à lui, implique d'autres structures cérébrales, notamment le cortex préfrontal médian (CPM).
Cette zone communique avec d'autres aires du cerveau, principalement pour inhiber des impulsions.
Quand on travaille à une tâche, le CPM va inhiber l'envie de se lever, de se gratter, d'aller ranger un truc qui traine par terre...
Bref, le TRN aide à restreindre et contrôler son comportement : il est à la base de notre capacité à être discipliné.
Chez une personne normale, le TRN et le DMN fonctionnent en "opposition de phase" : quand l'un fonctionne, l'autre est inhibé, et inversement.
Chez un TDAH, ces 2 réseaux sont en phase, et c'est ça qui est anormal et pose problème.
Le rôle de la dopamine, c'est d'agir comme un chef d'orchestre vis-à-vis de ces deux réseaux.
Mais qu'est-ce qui se passe exactement chez les personnes TDAH ?
En 2015 sort une étude qui va bouleverser la compréhension du TDAH (Spencer et al., 2015) : c'est la fameuse "hypothèse dopaminergique".
Ça faisait longtemps qu'on savait que la dopamine posait problème chez les TDAH avec notamment des niveaux trop bas.
Mais avec cette étude, on sait enfin précisément ce qui se passe.
Quand la dopamine est trop basse dans certaines zones du cerveau, ça entraîne l'activation de neurones qui n'ont aucun rapport avec la tâche en question, et ça entraîne défocus, hypercogitation et recherche de stimulation.
Et quand on regarde le comportement des TDAH qui s'ignorent, on remarque une tendance à consommer soit des drogues illicites (cannabis, cocaïne, amphétamines...), soit des stimulants légaux (nicotine, caféine...)
Toutes ces substances augmentent plusieurs neurotransmetteurs, dont la dopamine, notamment dans les zones en charge de réguler l'harmonie entre DMN et TRN.
Et chez les enfants TDAH (qui espérons-le, n'ont pas accès à ces stimulants-là), qu'est-ce qu'on observe ? Une appétence particulière pour les denrées sucrées, le sucre agissant également comme un stimulant dopaminergique dans les zones en charge du contrôle attentionnel (goût qui peut bien sûr rester à l'âge adulte 😉)
La consommation de ces substances n'est pas seulement un manque de contrôle de soi : c'est aussi une manière de s'auto-médiquer.
Comment faire pour retrouver sa capacité à se concentrer sur du travail important, de façon saine, quand on a un TDAH ?
C'est ce qu'on va aborder dans cette dernière partie.
On a vu que le TDAH rend le deep work soit physiologiquement impossible, soit totalement aléatoire et contre-productif.
La capacité de travailler en profondeur est conditionnée par le bon fonctionnement de deux réseaux (networks) de neurones : Default Mode Network (DMN) et Task-Related Network (TRN).
Chez Jung, ces deux réseaux fonctionnaient à merveille : le matin, il écrivait et son TRN s'activait. L'après-midi, en se promenant, c'était de son DMN qu'il profitait.
Une fois que j'ai pris conscience de mon TDAH, la première étape pour retrouver ma capacité à deep work a été la confirmation du diagnostic par un psychiatre et l'obtention de la médication.
Comme on l'a décrit, la médication va augmenter les taux de dopamine pour augmenter nos capacités attentionnelles et nos capacités à inhiber tout ce qui n'est pas pertinent par rapport à la tâche prévue.
Si la médication est contre-indiquée, plusieurs autres mesures peuvent être mises en place pour optimiser les taux de dopamine : routines, sommeil, alimentation, compléments alimentaires, activité physique, méditation...
Il faut aussi mettre en place les bonnes conditions, le bon environnement et les bonnes habitudes pour pouvoir avancer efficacement vers ses objectifs.
Mais même si la médication facilite ma capacité à me mettre en état de deep work, ce n'est pas magique. J'ai dû apprendre à utiliser cette nouvelle possibilité à bon escient.
Je conseille de préserver autant que possible ses matinées, éviter les réunions, les interruptions, pour vraiment se plonger dans ce "travail en profondeur".
Le matin est souvent le moment où notre énergie est au maximum, et où notre jus créatif est prêt à être pressé. N'hésite pas à utiliser la fonctionnalité "Concentration" de ton téléphone pour t'assurer de ne pas être coupé dans ton élan par une notification.
1 à 2 heures de deep work par jour, mises bout à bout sur plusieurs semaines, ça fait des miracles !
Certaines tâches qui semblaient être des montagnes deviennent des jalons clairs. Notre confiance en nos capacités augmente. Notre estime de soi se restaure.
A contrario, je préconise de garder les tâches simples, à faible investissement cognitif, pour l'après-midi, entre les réunions et avant de finir sa journée.
Personnellement, mes matinées sont consacrées à la lecture et à l'écriture : typiquement le genre de tâches non urgentes qui passent à la trappe, mais qui sont extrêmement importantes pour mon développement et celui de mon entreprise.
Depuis que mon TDAH est pris en charge et que je suis accompagné, je peux tenir ces habitudes sans partir dans tous les sens, sans chercher la moindre source de dopamine (vidéo youtube, nourriture, scroller...). Même si je craque encore (et c'est pas grave), ça devient quand même beaucoup plus facile de résister.
Le principal, c'est d'avancer.
Sur 2023, cette habitude m'a permis de déplacer des montagnes et de commencer 2024 avec un solobusiness rentable qui a du sens, que je prends plaisir à développer, et qui impacte réellement mes clients.
J'ai enfin une vision claire, une discipline et une autonomie dont je ne me serais jamais cru capable avant. Selon moi, c'est la recette pour construire de grandes choses. Pour réaliser son potentiel. Et toi aussi, tu en es capable.
Tu en profites aujourd'hui en lisant cette newsletter : pour un ex-roi de la procrastination comme moi, rédiger 19 newsletters, 19 semaines à la suite sans interruption, semble relever du miracle.
Alors que c'est en réalité le fruit d'une meilleure connaissance de moi et l'application des bonnes méthodes, et de ma capacité à deep work.
Le deep work, ou travail en profondeur, est une compétence cruciale à développer. La capacité à s'extraire des urgences, des sollicitations, du travail contraint détermine la qualité de notre travail.
La plupart des personnes qui ont impacté le monde l'ont fait grâce à leur capacité à abattre du travail de fond. À se plonger dans des activités cognitives à haute valeur ajoutée.
Toutefois, le TDAH peut poser de réels challenges. Et ils ne sont pas seulement une question de volonté ou de contrôle de soi.
Prendre le problème à la source et le comprendre, c'est pouvoir mettre en place des solutions efficaces pour s'en extraire. Pour avancer, enfin. Sereinement et sans lutter inutilement.
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Quand ce sera le bon moment pour toi, voici 2 manières dont je peux t'aider.
Tu peux prendre un rdv visio chez mon psychiatre pour partager tes difficultés, tes questionnements, et clarifier ta situation (tarif pris en charge en partie par la sécu et ta mutuelle).
Je veux un diagnostic de TDAH |
Tu es entrepreneur ou salarié et tu souhaites améliorer ta productivité avec un système simple et adapté à ton fonctionnement.
Tu travailles dans l'accompagnement, le coaching, et tu souhaites développer ton activité en 2024 tout en restant aligné avec tes valeurs.
C'est le moment d'en discuter ensemble !
Je veux passer à la vitesse supérieure |
C’est tout pour cette semaine !
N’hésite pas à répondre directement à ce mail pour partager tes ressentis, questions, remarques, ou idées de sujets : je lis et réponds à tous vos mails 💌
Tu peux aussi transmettre ce mail à un ami si tu penses que ça peut l'intéresser.
Je te souhaite une bonne semaine et à dimanche prochain !
Micka
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NB : Je ne suis pas un professionnel de santé, mais je suis personnellement touché par ce trouble. Même si je me base autant que possible sur des connaissances scientifiques fiables, ce contenu a pour but le divertissement, dans lequel je partage mon expérience, et ce que j’écris ne constitue aucunement des conseils médicaux. Pour tout conseil médical, tu dois te référer au professionnel de santé qui te suit.
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